Youpi & Voilà – €

Adresse :
41 Av. des Grésillons, 92230 Gennevilliers

Téléphone :
06 26 04 14 80

ouvert du lundi au vendredi pour déjeuner (12h-14h)
et pour le café thé goûter (10h-18h)
Les après-midi et soirs de représentation (ouverture 1h avant / 1h après le spectacle).

formule déjeuner à 13,50€

Drôle de nom pour un restaurant, “Youpi et voilà” ! Comme si Patrice Gelbart et son acolyte Stéphane Camboulive, heureux de leur nouveau lieu d’expression, demandaient aux autres de continuer l’histoire. C’est peut-être juste une manière de dire qu’un restaurant est avant tout un lieu de possibles, un lieu d’échanges entre producteurs et cuisiniers, entre cuisinier et mangeur et entre toutes ces personnes qui viennent se nourrir de bonnes choses autant que d’un peu d’humanité. C’est aussi simple que ça, ou presque. On a connu le cuisinier, Patrice, à Paris. Il arrivait tout juste du Tarn et Garonne et de son auberge du Cérou, où il avait bousculé les habitudes des locaux avec une cuisine enlevée, instinctive. Là-bas, il connaissait l’origine de chaque légume, ou plutôt la main derrière chaque culture, chaque flacon de jus de raisin. Pour lui, se lancer dans la cuisine, ce ne pouvait être qu’à corps perdu et en insufflant du sens à son métier. Ne pas le faire comme un automate ou un soldat avec des produits sans âme, mais choisir dans un rayon de quelques kilomètres les paysans dont il avait envie de défendre le travail. C’était il y a quinze ans déjà.

Autant dire que Patrice Gelbart était un peu en avance. Circuits courts, saisonnalité, absence de soufre… ces mots font depuis longtemps partie intégrante de son vocabulaire.Arrivé à Paris où il retrouve Stéphane son ami de toujours, ils choisissent de poursuivre la démarche commencée dans le Sud Ouest. En 2012, ils repèrent un local à Colonel Fabien qui deviendra leur bistrot : “Youpi et Voilà”. Si l’engouement autour de cette nouvelle adresse est fort, les deux complices s’épuisent assez vite à proposer des prix très accessibles, à refuser de pratiquer le deuxième service – “hors de question de virer des clients de chez nous”- , à être aubergistes – “on buvait des verres jusqu’à pas d’heure avec nos amis vignerons en visite” – autant que cuisinier, “j’étais là à 6h30 du matin” raconte Patrice. Nous, on se souvient d’une très belle première rencontre avec une cuisine pleine de sensibilité et de vitalité, aussi vivante que les produits que Patrice cuisine. Un rythme intense qui dure trois ans.  “Après le Youpi, Patrice fait le papa pendant 6 mois. Avec Stéphane ils passent pas mal de temps ensemble, à prendre du recul. On s’est posé beaucoup de questions, notamment sur ce qu’est l’alimentation. On fait partie de l’alliance Slow Food, on a rencontré des artisans semenciers, des groupements de producteurs. Nous sommes à ce moment-là persuadés qu’il y a un véritable mouvement à initier pour que chacun se sente concerné par les bons produits. J’avais des clients qui, à 30 ans, n’avaient jamais mangé de tomates ou qui, à 60 ans, retrouvaient le goût de leur enfance. C’est dingue. Ce qui nous tenait à cœur aussi, c’était d’avoir une clientèle mixte, de tous les âges et de toutes les origines sociales.

C’est là qu’on nous a proposé d’occuper “la cuisine” pendant quelques mois aux Caves de Prague à l’heure du déjeuner. Finalement, nous y sommes restés trois ans !” Une cave à vin et à grignoter bien connue pour ses joyeuses quilles de vin nature, où les habitants du quartier et autres passants étaient ravis de se sustenter si bien à l’heure du déjeuner avec une formule épatante. On y a mangé en vrac des coques d’une fraîcheur inouïe, du poulpe si tendre juste aimanté d’un condiment qui claque, un magnifique jambon braisé escorté d’une polenta onctueuse et un gâteau au chocolat inavouable de gourmandise. Patrice l’affirme haut et fort

"Je n'ai aucun plat figé, je n'ai jamais rien noté, ça vient et puis ça passe. C'est du moment, de l'éphémère."

Des moments joyeux oui, pour toutes les personnes si attachantes qui ont investi ce lieu. « Certains clients me suivent depuis l’Auberge du Cérou. Ils m’ont même fait tout leur historique de plats depuis 20 ans. C’est drôle, ils s’en souviennent mieux que moi ! » Parfois, Patrice accueille dans sa petite cuisine des personnes qui s’interrogent sur une potentielle reconversion. “On doit dégager une certaine idée du bonheur” dit-il mi étonné, mi ému.C’est comme ça qu’il a ouï dire d’un nouveau projet de restauration au sein du théâtre de Gennevilliers.

Le théâtre, les premières amours de Stéphane, son associé, et de la compagne de Patrice. L’histoire ne dit pas s’ils y entrevoient un signe mais ils foncent. Ils échafaudent un dossier béton. Ils imaginent une cantine grouillante du lundi au vendredi, ouverte à tous, toujours avec des tarifs très accessibles et des assiettes vibrantes au cordeau, un salon de thé l’après-midi pour les moments de calme (le gâteau au chocolat devrait revenir !) avec café de torréfacteur, tisane du potager (!) et miel des ruches locales. Et les soirs de représentation, une ouverture exceptionnelle avec un menu rapide et facile à manger en lien avec la programmation. Il devrait y avoir également sur place un potager et d’immenses terrasses pour flâner et se mettre au vert. “On aimerait que tout le monde se sente concerné. Ait envie de pousser la porte, qu’il y ait un mélange, avec les habitants de la ville et pas seulement les Parisiens. On va vraiment essayer de créer un modèle au sein d’un lieu culturel, avec de nombreuses collaborations vertueuses et des approvisionnements en circuit court.”

On ne peut que se dire : “Youpi et voilà”.

photos : François Régis Gaudry

article écrit en partenariat avec l’Instant Parisien.